Quand j’ai prononcé mon intention de parler du célibat pour mon prochain article (qui tombe, ô surprise, en pleine semaine de la Saint-Valentin), je ne m’attendais pas à susciter autant de réactions. Mon intention était simple : aborder le célibat de front, parce que c’est omniprésent, parce que nous l’avons tous vécu, et surtout, surtout, parce que je sais, pour en être, que cette période de l’année, février et sa froidure, est un bon moment pour se demander sempiternellement par quel miracle on est encore célibataire cette année.
Je vais d’abord commencer par une nuance : le célibat n’est pas la solitude. Pas toujours, du moins, et quand bien même ce le serait par moments, ce n’est pas que ça. La solitude n’appartient pas aux célibataires : c’est un sentiment qui se vit de toutes sortes de façons, dans toutes sortes de circonstances, en couple ou pas.
Mon impression est que nous vivons dans une société construite sur l’idée du deux, du duo. Adam et Ève, Bibi et Geneviève (pas tant un couple, remarque), Élyse Marquis et Patrick Labbé dans les pubs de Tim Hortons… (J’arrête mes exemples ici : Patrick & Élyse sont le summum de la relation de couple, oui oui oui). Mais en même temps, et on aura tôt fait de me le pointer, cette impression résulte d’une perception : suis-je plus sensible à cette idée du couple omniprésente parce que j’ai envie de la vivre, ou ai-je envie de la vivre parce qu’elle est omniprésente?
Pour plusieurs célibataires qui souffrent de leur célibat (un célibat qui n’est pas choisi mais, disons, circonstanciel), le couple paraît comme une porte de sortie, voire la légitimation attendue, la consécration. Je suis intéressant parce que je suscite l’intérêt de quelqu’un, ou encore, je suis aimable parce que quelqu’un m’aime.
Et c’est ça que j’ai envie de te dire, trameur, trameuse, tramophile. Tu es déjà aimable. Tu es déjà intéressant.e. Tu n’as pas à devenir meilleur.e, plus, mieux que. Tu n’as pas à devenir autre chose. Tu es parfait.e comme ça, beau.belle comme ça : en pantoufles ou en smoking, les cheveux défaits ou le gel plein la tête (peut-être pas avec la tuque par-dessus le gel, c’est pas une expérience plaisante).
Je ne dirai pas tu n’as pas besoin de personne. Je ne dirai pas arrête de chercher et tu vas trouver. Je ne le dirai pas parce que ces petites pensées, inoffensives en apparence, elles peuvent vraiment devenir d’énormes sources de stress. Le paradoxe de la recherche amoureuse : comment chercher sans avoir l’air de chercher? Se montrer intéressé mais pas désespéré? Qui dessine la ligne, la règle, la limite?
Je ne dirai pas apprends à t’aimer toi-même. Ce n’est pas un mauvais conseil, mais si je dis apprends à t’aimer pour être aimé, ça vient brouiller les pistes. On ne travaille pas sur soi pour que quelqu’un d’autre vienne nous flatter dans le dos. On apprend à se flatter soi-même, pour que même en couple on soit bien tout seul. Parce que tous mes amis en couple le diraient, je crois : on n’est jamais 24/7 avec l’autre, et c’est parfait comme ça. Il faut du temps pour soi-même dans l’euphorie, même dans la passion, même dans la connexion incroyable avec l’Autre. Comme le soulignait si pertinemment mon amie poétesse Lux : vivre seul, c’est une forme de travail sur soi; vivre en couple, c’est une autre forme de travail sur soi.
À suivre!