La Communauté Retrouvée

Crédit: Sarah Salem, l’Anse-à-la-Cabane, mars 2018

Rêvez-vous d’une société plus juste? Une cause politique vous tient-elle à cœur? Avez-vous déjà été membre d’un groupe qui visait l’avancement de cette cause? Avez-vous quitté ce groupe? Pourquoi?

Beaucoup se reconnaitront dans ce petit questionnaire. L’éventail des causes sociales est vaste, les groupes de pression sont multiples et leur fonctionnement varie les uns des autres. Militer au sein d’un parti politique ce n’est pas exactement comme s’impliquer dans une coopérative écologiste ou être délégué.e syndical.e d’une petite entreprise. Malgré les différences, une chose demeure commune à toutes les causes : après 3 ans d’implication, beaucoup finissent par abandonner. C’est peut-être votre cas. C’est aussi le mien.

Je proviens du milieu militant universitaire, pour ne pas dire uqamien. Je me souviens, alors que j’étais au secondaire, avoir parcouru le niveau métro de cette université et avoir été imprégné par cette atmosphère militante, exposée sur les centaines de babillards au dédale des corridors. C’est d’abord cette ambiance de désir de changement social qui m’a poussé, de nombreuses années plus tard, à choisir l’UQAM pour mes études en littérature. Nous étions à l’automne 2011. Bon sang! que j’allais être servi en matière de climat militant l’année suivante!

Cette idée qu’une forte majorité de personnes dédiées à une cause finissent par abandonner la militance, je ne la puise pas dans un chapeau. Elle provient d’une étude marquante de Jean-Marc Piotte, professeur et sociologue. En 1987, il publiait le résultat de ses recherches intitulé «La Communauté perdue : petite histoire des militantisme». Après avoir interviewé 26 militant.es actif.ves durant les années soixante et soixante-dix provenant de divers horizons : «Parti Québécois, organisations féministes, mouvement contre-culturel, Front de Libération du Québec, syndicalisme de combat, groupes populaires, P.C.O., En lutte!, etc.» Piotte en vient à des conclusions extrêmement pertinentes. Parallèles entre le dévouement religieux et le dévouement militant, les rêves de jeunesse brisés par la désillusion, luttes internes au sein du groupe plutôt qu’avancement de la cause, ne sont que quelques uns des constats récurrents recueillis au fil de ses entrevues. Je vous invite à la consulter dans son intégralité ici si vous voulez en savoir davantage.

On présente généralement les Îles-de-la-Madeleine en évoquant ses paysages, sa cuisine, sa culture, son histoire… Je la présenterai dorénavant comme cet endroit qui m’a redonné espoir. Espoir que la communauté puisse se faire valoir et s’ouvrir sur les autres, que les citoyen.nes aient un réel pouvoir décisionnel, que les pauvres puissent empêcher des projets ravageurs menés par les riches, que les employé.es aient leur juste part des profits. Après de nombreuses années de luttes sociales en ville, je peux vous assurer que le cynisme m’avait gagné. Mais de participer activement au sein d’une communauté, moins nombreuse et mieux tissée, cela me fait sentir comme un citoyen à part entière. J’en suis encore à mes premières années aux Îles, j’ose espérer que ce n’est pas le coup de foudre qui m’aveugle!

J’entrevois de nombreux traits positifs à cette communauté madelinienne. Ayant participé aux deux dernières éditions du Forum des Partenaires, j’ai pu constater cette approche visant à réunir le milieu des affaires, le milieu communautaire, le secteur publique et les citoyen.nes afin de discuter d’enjeux sérieux et de permettre de proposer des solutions. Ça m’a particulièrement impressionné de voir autant de gens réunis. Que dire des sources d’information locale qui sont tout à fait pertinentes, à la radio comme dans le journal; où les enjeux politiques sont généralement traités en profondeur et avec un professionnalisme qui n’est pas l’apanage de tous les médias. Il y a toutes ces personnes, que je connais de près ou de loin, qui témoignent du respect à leurs opposants politiques. C’est cela qu’exige la vie communautaire. Pourrait-on faire autrement sur une île?

Enfin, tout n’est pas rose. Bien entendu, la proximité entre les habitant.es des Îles a d’autres impacts sur la façon de militer ou de faire avancer une cause en comparaison aux milieux urbains. On trouvera plus difficilement des allié.es, on va se buter plus souvent à l’argument «ça l’a toujours été de même», notre parole et nos idées, lorsqu’elle trouve écho, nous expose davantage en tant qu’individu. Ce sont des défis propres aux petites communautés. Et cette communauté des Îles-de-la-Madeleine, elle m’a redonné de l’espoir et l’envie de m’y impliquer. C’est vraiment énorme pour un ex-uqamien désillusionné!

 


Écoute la trame: Paul Piché – Heureux D’un Printemps

 

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