
Le temps est menaçant en ce gris matin de novembre. C’est l’automne aux Îles, les vents violents soufflent sans répit. C’est le temps des grandes marées, celles qui balaient tout sur leur passage, rongent les caps et façonnent inexorablement la plage de mon enfance. En marchant sur le sable, face au grand vent qui me fouette le visage et ralentit mes pas, j’observe les vagues agressives qui déferlent sur les falaises et m’éclaboussent au passage. Je me laisse emporter, témoin silencieuse et privilégiée, éblouie devant l’immensité de cette mer agitée.
Et pourtant là, seule devant l’infini, au cœur de la tempête, je me sens étrangement calme. Alors que la nature se déchaîne à l’extérieur, lentement, doucement, je retrouve le calme à l’intérieur de moi. Paradoxalement, alors même qu’elles sont secouées par les torrents, à la merci des éléments, les Îles continuent d’exercer sur moi cet effet réconfortant. Comme un refuge. Face aux petites et grandes tempêtes qui jalonnent notre vie, lorsqu’on se sent submergés, on a tous besoin d’un endroit où se réfugier, pour se mettre à l’abri, le temps de se sortir la tête hors de l’eau. Cela me rappelle une phrase lue quelque part du grand maître zen Thich Nhat Hanh qui enseigne la méditation et parle de l’importance de revenir à son « île intérieure » pour retrouver la paix. Cette île en moi est intrinsèquement liée à ces Îles qui m’ont vu grandir et me portent depuis toujours. Comme si la force tranquille de l’archipel, habituée à se battre contre vents et marées, m’insufflait l’énergie de continuer.
L’automne s’achève. Dans quelques semaines je repartirai vers la grande terre et le Grand Nord, prête à reprendre ma route et à continuer de surfer les « vagues de l’existence ». Confiante, mais surtout curieuse de voir jusqu’où tout cela me mènera… Mais peu importe où j’irai, je suis prête pour l’aventure, car je garde en moi cet « ancrage » et je sais que, quelque part perdu au cœur du golfe, se trouve mon refuge.
Jessica Boudreau
Écoute la trame parce que : Depuis que des amis me l’ont fait découvrir, cette chanson me réconforte quand j’ai le mal du pays. Peu importe où je suis, les mots et la voix chaleureuse de Nathalie Merchant me ramènent chez moi sur mon île. Laissez-vous aussi bercer par la vague…
Une réflexion sur “Mon refuge”